
La victoire d’un des deux adversaires entraîne automatiquement la défaite de l’autre. Mais l’inverse est aussi exact : la défaite de l’un entraîne la victoire de l’autre.
Il y a deux façons de gagner : aux points ou par K.-O., et plusieurs façons de perdre : par arrêt de l’arbitre, par abandon (jet de l’éponge), par disqualification ou par forfait.
Aspects de la défaite
Personne n’aime perdre. La défaite est une pilule amère... Inutile de tomber à bras raccourcis sur le perdant après le combat. Il a son compte de détresse et s’il sent trop dans le regard de son entourage qu’il n’est plus perçu de la même manière que lorsqu’il gagnait, il risque bien de se dégoûter à jamais de la boxe. Sans parler des « mauvais perdants », qui n’ont pas l’esprit sportif (la défaite fait partie du sport), ni de ceux qui ne s’intéressent à une activité que tant qu’ils peuvent y briller.
Celui qui gagne n’apprend rien sur lui-même. La défaite est l’occasion de faire le point, de mesurer ses forces et ses faiblesses. On s’endort parfois sur ses lauriers et la défaite peut être l’occasion d’un sursaut, d’une nouvelle approche de son activité.
On dit parfois que le but de la vie n’est pas le bonheur mais l’apprentissage. Nous serions sur terre non pas pour "prendre notre pied" (on s’en doute parfois un peu...) mais pour apprendre, pour expérimenter, pour évoluer. Les occasions de sauter de joie sont toujours bienvenues et il n’est pas dit que la vie doivent nécessairement être une suite de désespérances et d’épreuves douloureuses hautement profitables ! Mais toutes les circonstances qui nous permettent de mieux nous connaître, de progresser, de découvrir de nouveaux aspects de nous-mêmes ou de la réalité extérieure sont plus utiles que l’ivresse d’une soirée de victoire qui apporte des satisfactions au Moi superficiel mais ne change rien à l’être en profondeur.
Vive donc la défaite !
Pour les professionnels, elle fait même partie du jeu. Elle crée la dynamique des compétitions internationales. La perspective d’une revanche, l’alternance de passages à vide puis de retour en force, les incertitudes quant à la capacité d’un boxeur à retrouver sa forme - tout cela fait la vie de la boxe.
Le plus délicat sans doute à gérer dans la défaite, c’est l’entourage (Voir cet article). Celui-ci a tendance à projeter sur son favori la figure psychologique du héros (Voir cet article). Pour peu que le champion accumule victoire sur victoire, on ne le voit plus tel qu’il est (un simple homme soumis à la loi universelle du flux et du reflux) mais comme un mythe, celui d’une image humaine idéale, quasi divine, qui justement se situerait hors de la vie, hors de la loi du flux et du reflux, de la mort et de la renaissance. La projection psychologique (Voir cet article) se produit parce que le boxeur a accumulé des succès et semble (mais semble seulement) être identique au « héros intérieur » de chacun.
La défaite provoque brusquement la projection de l’image inverse, celle du « looser », du raté. D’où, souvent, deux réactions : colère et dévalorisation. La défaite semble toucher personnellement les membres de l’entourage. C’est qu’ils vivaient une aventure personnelle, intérieure et secrète, à travers le boxeur. Comme on dit, un bout de leur âme était allé se « scotcher » sur l’autre. La défaite fait que ce bout se détache du « héros réel » et provoque une douleur, une révolte, un déchirement.
Pour compenser cette déception, on dévalorise le boxeur : non seulement il est fini, mais, au fond, il n’a jamais été un aussi grand champion que cela... D’un coup, on tire un trait sur tout son passé, on perd toute capacité à l’analyser objectivement. C’est à l’entraîneur d’aider le boxeur à rétablir sa vérité, à intégrer la défaite dans son parcours sportif et à l’utiliser pour modifier le programme d’entraînement.